Madame- Florence Foresti

Ce n’est pas, vous l’aurez bien compris, un registre sur lequel j’aime m’épancher.

Pourtant, en écoutant le Show de dame Foresti, j’y ai trouvé quelque chose de différent.

Je ne m’y attendais pas.

Pas qu’un jongle de clichés, d’humour tranquille et de gaieté.

Non, ce spectacle est autre. Il questionne, il nous questionne. Il met le doigt sur despeurs, des doutes,bien loin des sujets doux et triviaux, sans aucune arrière-pensées.

Les sujets sont épineux, entre rire et désespoir, entre angoisses et amusement.

Je ne suis pas friande d’humour potache, de jeux du quotidien, d’actualités ou de banalités, bien que, comme tous, j’apprécie de rire.

Mais mon humour est un brin tyrannique, noir et exigeant.

Il aime les mots à la Devos, les sarcasmes à la Desproges, l’insolence à la Guillon, les provocations à la Coluche.

Et aujourd’hui, il a aimé “Madame” de Foresti.


Analyse

 

Florence Foresti commence fort, dans une ambiance beaucoup plus simpliste que dans ses shows passés.
Plus de paillettes, plus de danseurs, plus d’imitations. 

Plus qu’elle. Et ses angoisses. Et ses névroses. Et ses casseroles. Et son rapport avec elle-même. Avec la société.

Elle s’attaque d’emblée aux obsessions des femmes pour leur corps, guidées par la Société Moderne et soulève des questions qui m’ont interpellée (et pourtant je n’ai pas 40 ans, je ne suis pas aussi “vintage” qu’elle).

Comment être une femme dans ce monde occidental?
Comment être une femme épanouie à son âge et finalement à n’importe quel âge?

Celle qui, sous ses allures de garçon manqué, nous fait part de ses déboires, de son sentiment de ne pas se sentir belle, désirable ou en phase avec ces femmes des magazines aux proportions “idéales”, déambule d’un bout à l’autre de la scène avec une énergie folle.

La mise en scène est assez simple et j’ai beaucoup aimé le passage symbolique du couloir, celui qui la mènera sous peu vers la ménopause, la retraite et inéluctablement la mort.

 

Les thèmes choisis sont crus, durs, et on ne connaissait pas Florence Foresti avec cette pointe d’humour noir, lorsqu’elle lâche qu’à 40 ans il ne peut plus rien lui arriver et que “[s]a prochaine aventure, c’est le cancer.”

Peut-être qu’avec Stromae et son tube, c’est devenu tendance de parler de maladie?
Peut-être que le tragique de la vie, c’est vendeur?

Dans tous les cas, c’était un pari risqué pour l’humoriste que de déterrer les démons enfouis de chacun d’entre nous: souffrance, mort, maladie….

Car c’est une certitude, son spectacle ne parle pas que de clichés drôles du quotidien. Il fait remonter à la surface les angoisses de chacun dans cette société où la mort est taboue.

En dehors des thématiques plutôt graves qu’elle aborde, Florence Foresti nous décrit aussi, et c’est devenu une habitude depuis quelques spectacles maintenant, son quotidien et sa manière humaine de gérer, non plus la maternité ou l’accouchement, mais l’éducation de sa fille, Toni.

C’est un passage qui m’a particulièrement fait rire, tant on demande aux Femmes d’aujourd’hui d’être tout.
Et d’être parfaites dans tout ce qu’elles sont.

De voir une humoriste parler de l’école et de ces mères calmes et “cool“, ponctuelles qui font chier -Ah! Jalousie quand tu nous tiens!!!-  les mères qui sont à la bourre, à moitié mal fagotées, pas forcément bien organisées, ni même dans une éducation parfaite…
Ca déculpabilise un grand paquet de femmes ! Ca fait du bien au moral.

Finalement, ce spectacle, en dehors d’être axé sur des thèmes difficiles rendus drôles par l’humoriste, c’est aussi un spectacle à tendance “féministe”, sans toutefois déborder clairement, puisque certains clichés demeurent.

C’est aussi un petit hommage à l’actrice que Florence Foresti admire beaucoup: “Arletty”. Une imitation brillante qui clôt le spectacle….
C’est tellement plus intéressant de mettre la lumière sur des actrices inspirantes plutôt que sur Shakira ou Beyoncé (comme elle avait pu le faire dans ses shows précédents…)

J’interprète son spectacle, pas tant comme féministe pur et dur, mais comme l’état d’esprit des femmes qui ne se reconnaissent plus dans les codes et les normes de la Société actuelle et qui, globalement, souffrent.

Puisqu’elles vivent avec un problème d’image, étant donné qu’elles ne correspondent pas aux Beautés admises des clips et des magazines , et que cela engendre des problèmes de culpabilité -puisqu’elles n’arrivent pas à être tout en même temps et parfaites dans tout-.

Florence Foresti met le doigt sur un symptôme de notre société excessive, du tout, du rien, des tabous de ce qui est naturel, du peu nuancé et du paraître.

C’est un peu le cri d’une Femme Insoumise.

Et ça, ça me parle !

Le génie de ce spectacle, pour moi, c’est; tout d’abord, d’avoir réussi à parler de sujet tabous et clairement morbides en les transformant habilement en sujets drôles, et ensuite, d’avoir réussi à trouver les malaises féminins dont la société de consommation actuelle est responsable, et de les avoir rendus ringards et absurdes, déculpabilisant ainsi des millions de femmes.

 

 

C’est ça le génie de l’art: cette catharsis incroyable.

 

Un spectacle donc à voir, mais attention, il peut laisser des traces !


Infos:
Florence Foresti
Site web

 

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