Plaire, aimer et courir vite – Christophe Honoré

Lors du Festival de Cannes, j’ai pu découvrir ce film au casting bluffant.

Critique Par Manon Garrido.

Attention: SPOILER ! 

Le drôle de casting

Les rôles principaux sont campés par trois acteurs déjà bien ancrés dans l’univers du cinéma et de la télévision. Pierre Deladonchamps (qui joue également dans le film présenté à Cannes « Les Chatouilles« ), Vincent Lacoste, jeune acteur que l’on connaît plutôt dans d’autres rôles notamment dans des films d’ado et/ou comiques, et enfin Denis Podalydès, plutôt présent dans des films tout à fait différents: sombres, comiques ou d’auteur et qu’on ne présente plus.
Trois acteurs donc, que j’apprécie d’ordinaire et que je ne m’attendais pas du tout à retrouver à l’affiche d’une sorte de romance homosexuelle impossible, entre la comédie et le drame.

Une trame mainstream

Le film se déroule dans les années 90, années noires en France marquées par des contaminations au VIH importantes et par les premiers décès dus à cette maladie. Alors oui, on pourrait s’attendre à une surenchère, à un doublon, à un film relativement déjà vu puisque c’est un thème récurrent ces dernières années… Et pourtant, Plaire, aimer et courir vite se distingue d’emblée d’un superbe 120 battements par minute, combatif, ou d’un Pride, résolument social et comique.
Malgré les similitudes, le long-métrage de Christophe Honoré raconte tout autre chose.

***Petit Spoiler***

Histoire d’inconnus, de malentendus, de questionnements…. Mais surtout histoire de coeur.

C’est bien ce qui arrive, au détour d’une salle de cinéma, à Jacques, écrivain raté séropositif et père d’un petit garçon et Arthur jeune homme directeur de colonies de vacances, émotionnellement perdu et encore officiellement hétérosexuel.

Un coup de foudre qui engendre une histoire improbable mêlant fusion, joies intenses, non-dits et attentes insatisfaites.

Le film expose à la fois les problématiques de ce couple qui n’est pas comme les autres, celles d’un écrivain homosexuel et papa, celles, aussi du voisin gay et cérébral qui ne plaît pas aux hommes et bien sûr, celles du jeune homme gay, qui a une copine pour la façade. Avec, comme trame de fond, comme compagnon assoiffé et morbide, le Sida.

Evidemment, analysés comme cela, les personnages peuvent paraître clichés mais il n’en est rien.

Des personnages hauts en couleur.

On ne s’ennuie pas devant Plaire aimer et courir vite. D’ailleurs, les personnages ont toujours un temps d’avance sur le spectateur, le surprennent, le font rire et l’embarquent dans des sentiments contradictoires.

A noter la superbe prestation de Vincent Lacoste, attachant, drôle, touchant, extrêmement enjôleur et mystérieux…. Une perle dans ce rôle si lointain de ceux qu’on lui connaît !

Le personnage de Jacques, lui aussi, est assez perturbant et brillamment porté par Pierre Deladonchamps: entre la façade du père qu’il souhaite être, l’homme vibrant séduit pour la dernière fois et celui recroquevillé et dépressif, débordé et faible qui se livre à son voisin Mathieu (Denis Podalydès ndlr.)

Enfin, ce dernier, le fameux voisin désespéré et très littéraire, qui se sent régulièrement rejeté, délivre des messages profonds de respect, d’amour et de tolérance. Même vexé, il reste drôle et bienveillant, n’oubliant jamais l’amitié qui l’unit à Jacques. Une belle leçon !

Nostalgie, madeleine de Proust

Evidemment, pour tous ceux qui ont connu les années 90, ce film est un petit sucre d’orge….
Il rassemble tous les éléments des temps révolus où l’on côtoyait ses voisins comme des membres de sa famille, où la séduction était un art, un périple….  Tous ces petits éléments qui rendent le film encore plus attachant: on s’appelait d’une cabine téléphonique, on programmait appels et visites longtemps à l’avance et ô joie suprême, on s’envoyait des lettres dégoulinantes de mots doux…

A des années lumière de la consommation de l’autre réduite à un mouvement vers la droite ou vers la gauche sur l’écran d’un smartphone.
(C’était la minute « c’était mieux avant)

En bref !

Ce film, bien qu’il comporte quelques clichés et scènes qui traînent en longueur, dévoile ces deux jeunes hommes et ce qu’ils sont….
Ils sont la séduction, ils sont le jeu, l’attente interminable de l’autre, le déchirement de son absence, les vibrations, la passion infernale. Et la mort.

Je ne peux que vous conseiller de le voir… Je pense que vous passerez un bon moment….
Et n’oubliez pas de me donner votre avis en commentaire !

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